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  • Introduction

Au milieu du XIXe siècle, la Révolution Industrielle bat son plein en Belgique, alors seconde puissance économique mondiale après la Grande Bretagne.  Le canal Bruxelles-Charleroi, ouvert à la navigation en 1832, la gare ferroviaire de Tubize inaugurée en 1840, offrent d’excellents moyens de communication pour acheminer les matières premières jusqu’aux Forges de Clabecq et expédier ses produits finis.  On est loin déjà du petit Moulin à battre le fer né en 1781.  Désormais, l’usine de Clabecq figure parmi celles qui comptent dans le pays.  Pour se faire une idée de son développement depuis un demi siècle, nous disposons d’une gravure de 1851 et de plans cadastraux. 

  •  Le plan de l’Atlas des chemins vicinaux de Clabecq (1843-1846)

 

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 Etabli sur la base du cadastre primitif, indiquant déjà le tracé du premier canal Bruxelles-Charleroi, ce plan est le plus ancien que nous ayons retrouvé qui soit suffisamment précis et détaillé pour pouvoir être comparé aux plans ultérieurs.  Sur ce plan, le tout premier haut fourneau de Clabecq, établi en 1810 mais qui ne fonctionna que très peu d’années, n’apparaît déjà plus.  La fonction des différents bâtiments n’est malheureusement pas encore indiquée.  Le recours aux archives du Cadastre primitif, de même qu’à celles de la construction du canal, devrait peut-être nous faire découvrir d’autres plans.  Ce travail de recherche exigeant reste encore à faire. 

Les Forges appartiennent depuis 1841 à Edouard Guillaume Goffin seul.  Entre 1828 et 1838, elles avaient appartenu à Léopold Eloi Besme, Edouard Guillaume Goffin et Nicolas Joseph Warocqué, et entre 1839 et 1841, à Edouard Guillaume Goffin et Léopold Eloi Besme.  Edouard Guillame Goffin oriente alors l’entreprise vers la transformation de produits de hauts fourneaux et l’utilisation de la mitraille.  Selon certains auteurs, il renouvelle l’outillage des Forges en 1845 et fait construire une grande fonderie.  En 1850 le premier laminoir à fers marchands est mis en place.  Ce sont toutes ces transformations que l’on peut constater entre le plan cadastral de l’Atlas de chemins vicinaux et celui établi par Popp quelques années plus tard. 

On constate que depuis 1816 (voir le croquis d’époque) les bâtiments se sont fortement étendus.  Le moulin à moudre le grain est bien présent.  Il est composé de deux parties, l’habitation du meunier et le moulin proprement dit.  Il est possible que les bâtiments situés en amont du moulin, au-dessus du canal de décharge d’eau soient encore les écuries mentionnées en 1816.  En face du moulin, de l’autre côté du canal de décharge, le bâtiment qui abritait primitivement le moulin à battre le fer s’est considérablement étendu.  Pratiquement toute la cour représentée sur le croquis de 1816 est désormais bâtie, de même qu’une partie de la prairie qui la jouxtait.  Mais on ignore à quoi servait exactement ces nouveaux bâtiments.  Certains, que l’on devine sur la gravure de 1851 et qui existent encore comme tels sur le plan Popp n’ont peut-être pas changé de destination durant la vingtaine d’années qui séparent l’Atlas des chemins vicinaux et le plan Popp.  Les constructions situées en face de l’élcuse (n° 46) du canal Bruxelles-Charleroi, sont bien visibles sur la gravure de 1851. 

  • Le plan Popp (vers 1860 [1858 ?])

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Le plan cadastral de Clabecq, établi vers 1860 par Philippe-Christian Popp, est encore plus précieux, car il est accompagné d’une matrice cadastrale qui détaille, parcelle par parcelle, l’affectation des bâtiments.   On note déjà quelques différences par rapport au plan de l’Atlas des chemins vicinaux, en particulier pour l’aile Est qui n’existait pas encore sur le plan précédent. 

Edouard Guillaume Goffin abandonne les affaires en 1851 et passe la main à ses deux fils.  A l’époque du plan Popp, l’usine appartient donc à Charles-Henri et Josse-Philippe-Auguste Goffin, maîtres de forges.  Selon certaines informations, en 1854, les Forges comprenaient 4 fours à puddler, 2 fours à réchauffer les paquets, 3 trains de laminoirs, des cisailles, des machines à vapeur, …  En 1857, elles comptaient également un premier grand laminoir à tôles.  Pour faciliter les transports, les Goffin établirent en 1858, à leurs frais, un chemin de fer reliant l’usine à la station de Tubize.  Cette voie de chemin de fer n’apparaît pas encore sur les plans Popp de Clabecq ou de Tubize, ce qui indiqueraient qu’ils sont en réalité antérieurs à cette date.

Sur le plan Popp, le complexe atteint presque 3 ha et se compose :    

  •  d’un côté du canal de décharge, du moulin à grain (n° 204),
  • de la maison, bâtiment (écuries ?) et cour du meunier (n° 201 a),
  • d’un bâtiment déjà ancien (il apparaît sur le croquis de 1816) situé au niveau des vannes du barrage sur la Sennette (n° 202 a),
  • d’une fonderie « de tourn. » [de tournures ?, c’est-à-dire permettant de refondre tous les déchets du laminoir (copeaux, limaille de fer, déchets de découpe, …)] (n° 205 b) située à côté du moulin à grain sur l’îlot formé par le canal de décharge,
  • de l’autre côté du canal de décharge, en partie au-dessus de celui-ci, formant une grande cour centrale, d’une maison (n° 199 b),
  • d’une forge et fonderie en fer, qui englobe le bâtiment de la forge à battre le fer de 1781 (n° 199 a),
  • d’un laminoir qui, avec le bâtiment précédent forme l’aile Ouest (n° 199 c),
  • d’une fonderie de fer qui forme l’aile Nord et une partie de l’aile Est (n° 200 a),
  • d’un atelier à masser qui termine l’aile Est (n° 206 p),
  • d’un bâtiment accolé au chemin de halage (n° 206 h),
  • d’une maison et cour située face à l’écluse du canal (n° 196 e),
  • d’un grand bâtiment formant l’aile Sud composé d’une maison, bâtiment et cour (n° 198 a)
  • de jardins (n° 205 a, 196 f, 206 n et 206 q),
  • de pâture, pré ou terre (n° 203 a, 206 o et 206 r),  
  • enfin, d’une maison située à l’écart (n° 206 c).   

 

  • La gravure de 1851

 

 L’unique illustration que nous ayons des Forges au milieu du XIXe siècle est la lithographie publiée dans La Belgique industrielle, un magnifique ouvrage destiné à vanter à l’époque le prodigieux développement industriel du pays. 

Confrontée au plan cadastral Popp, cette vue prise depuis l’autre rive du canal Bruxelles-Charleroi apparaît comme très fidèle.  De gauche à droite, on apperçoit d’abord une maison de deux niveaux.  Il s’agit vraisemblablement d’une partie du bâtiment n° 198 a du cadastre, orienté parallèlement au chemin menant de Tubize à Clabecq.  Sur le plan de l’Atlas des chemins vicinaux, un espace vide sépare cette maison du bâtiment qui se trouve sur sa droite, ce qui semble bien encore être le cas ici.  Ce passage semble avoir été bâti par la suite.  Sur la droite de cette maison se profile le bâtiment le plus élevé du complexe.  Il s’agit de toute évidence de la partie centrale du n° 198 a du cadastre.  Il est bâti sur trois niveaux et demi et compte apparemment 5 travées.  On apperçoit clairement l’ouverture centrale avec monte charge au dernier niveau.  Ce bâtiment ce prolonge sur la droite par un premier volume moins élevé dont on n’apperçoit que l’extrémité droite de la toiture terminée par une coupette.  Il est complété par un troisième volume alongé, d’un seul niveau.  A l’avant-plan de ce long bâtiment, on remarque la présence, à droite, d’une maison d’un niveau et demi et de cinq travées qui correspond au n° 196 du cadastre, et à gauche d’un bâtiment allongé d’un seul niveau precé d’une porte et d’une petite fenêtre qui doit être le n° 206 h du cadastre.  A l’arrière-plan, on devine toute une série de bâtiments et de cheminées, parmi lesquels doit figurer le moulin à l’origine des Forges.  On distingue nettement un grand bâtiment rectangulaire.  Il s’agit vraisemblablement du laminoir qui correspond au n° 199 c du cadastre.  Au fond à droite, on distingue parfaitement un long bâtiment qui doit être la fonderie en fer correspondant au n° 200 a du cadastre.  Tout à fait à droite, on apperçoit la partie de cette fonderie qui fait l’angle avec l’aile Est.  Cette aile se prolonge en direction du canal par un bâtiment identifié comme un atelier à masser et qui correspond au n° 206 p du cadastre.  L’habitation située un peu à l’acart, le n° 206 c du cadastre, n’apparaît pas ici sur la gravure.  On voit, par contre, en arrière-plan à droite, une maison qui doit être située le long du chemin de Tubize à Clabecq et qui pourrait peut-être correspondre au n° 149 de la section B du cadastre de Tubize.  L’avant-plan de la gravure est occupé par le premier canal (à 70 tonnes).  A gauche se distingue parfaitement le pont sur le Canal.  Un baquet (bateau pouvant transporter 70 tonnes) est arrimé au quai face aux Forges. 

 

Vous pouvez utiliser cet article ou les informations qu’il contient, à condition d’indiquer la référence suivante :

Luc DELPORTE, Les Forges de Clabecq au milieu du XIXe siècle, Extrait du site www.museedelaporte.be (Consulté à la date du …).

 

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